Les clubs d’e-sport sont-ils au cœur d’une bulle spéculative ?


A en croire les nouvelles qui parviennent régulièrement du monde de l’e-sport, l’avenir s’annonce radieux pour les clubs. En juillet 2021, l’équipe britannique Excel Esports a collecté 20 millions d’euros auprès d’un fonds d’investissement privé. Quelques mois plus tard, en janvier, c’était au tour de la française Team Vitality d’annoncer le franchissement d’un nouveau cap, avec une levée de fonds record de 50 millions d’euros sur trois ans. Plus récemment, en juillet, l’écurie étatsunienne FaZe Clan, qui s’est illustrée dans le jeu vidéo Counter-Strike : Global Offensive, s’est même décidée à entrer en Bourse.

La réalité économique du secteur, pourtant, ne semble plus correspondre aujourd’hui aux promesses d’expansion d’hier, de nombreux clubs affrontant de lourdes déconvenues budgétaires. FaZe Clan, justement, accuse près de 19 millions de dollars (19,4 millions d’euros) de pertes nettes sur le premier semestre, et le cours de l’action s’est effondré en quelques mois : introduite à environ 13 dollars, elle en vaut aujourd’hui moins de la moitié. Le groupe e-sportif américain Enthusiast Gaming, lui, a enregistré une perte nette de 26 millions de dollars, tandis que le club britannique Guild Esports, soutenu par l’ex-footballeur David Beckham, s’est appauvri de 6,1 millions de dollars.

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Franchises et investissements massifs

Certains investisseurs voient dans ce paradoxe le symptôme d’une bulle spéculative et ont commencé à rediriger leurs fonds. Créateur, au début des années 2000, de la compétition internationale eSports World Convention (ESWC), le Français Matthieu Dallon dirige aujourd’hui Trust Esport VC, un fonds d’investissement consacré à l’e-sport.

Sur l’enveloppe de 20 millions d’euros qu’il a levée auprès des groupes Fimalac, Amaury et de la Française des jeux, pas un centime n’a financé une équipe, rapporte-t-il au Monde. « Aujourd’hui, en dehors des family offices [des organisations privées contrôlant le patrimoine de familles fortunées] de personnes privées, il n’y a plus de fonds pour investir dans des clubs. » Ce terrain de jeu est trop incertain, presque jamais rentable, constate l’homme d’affaires.

Pour Xavier Oswald, cofondateur de la société de production événementielle Gozulting et directeur business et stratégie de l’équipe française Karmine Corp, l’une des racines du problème remonte aux années 2017-2019. Trois jeux en vogue – LoL, Overwatch et Call of Duty – ont, à l’époque, vu leurs compétitions officielles être peu à peu franchisées par leurs éditeurs respectifs, Riot Games et Activision Blizzard. Sur le modèle des sports traditionnels nord-américains, les clubs souhaitant y participer doivent désormais payer un droit à l’entrée, chiffré à plusieurs dizaines de millions de dollars.

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